Plus glacial, t'es cryogénisé
J'ai presque envie de dire : heureusement que j'ai déjà vécu ça. Heureusement que je sais comment ça se passe. Heureusement que j'ai été accompagnée autrement les premières fois, avec une empathie éclairée et des explications porteuses d'espoir.
Heureusement que j'ai changé aussi. Heureusement que je suis plus forte. Heureusement que je sais aussi que l'espoir est là, malgré tout. Parce que niveau compassion et information, faudra repasser.
Bonjour, tout va bien, ça fera 75 euros, au revoir.
Il doit être payé au mot parce qu'il n'en a guère prononcé plus. Et encore. J'ai du lui extirper, au cours de l'écho, quelques précisions. Mais à quoi pensent ces médecins qui nous examinent sans un mot, en prenant mesure sur mesure, sans daigner s'adresser à nous ? Merci, je sais que là il va vers la droite avec sa sonde et qu'il est en train d'examiner mon ovaire, quelques follicules et un kyste en régression. C'est du déjà vu pour moi. Mais pourquoi ne pas me l'expliquer ?
Ok, je suis sans doute trop exigeante avec mes explications scientifiques.
Mais l'empathie, la simple compassion pour une patiente, elle est où ?
Le pire dans tout ça c'est que je n'arrive pas vraiment à lui en vouloir. Il ne le fait pas exprès. Il est juste blasé, habitué, anesthésié. Ca se voit dans son regard. D'un point de vue professionnel, je suis certaine qu'il fait de son mieux. Mais d'un point de vue humain, je me demande juste à quel moment, dans sa carrière, il en a trop vu pour en arriver à troquer l'humanité contre la froideur de l'habitude. A quel moment, par routine ou pour se blinder, il a enfilé, en même temps que sa blouse blanche, son masque si professionnel et si impassible.
En tout cas, au pays de la chaleur humaine, il ne risque pas de mourir de la canicule.
(Photo trouvée sur We heart it)